Se tient au musée d'Orsay jusqu'au 6 janvier une exposition de dessins d'Odilon Redon. Si j'ai été parfois laudatif et apollogétique sur quelques articles postés précédemment, je suis beaucoup plus mitigé et circonspect ici.
La grande majorité des feuilles exposées ne m'inspire guère qu'indifférence et mépris... L'impression finale me laisse sur une note dépitée et sans le sentiment d'avoir découvert quelquechose de nourrissant artistiquement ou intellectuellement. On pourrait rapprocher ces vils croquis de malencontreuses élucubrations graphiques de potache en proie à l'ennui.
Mis à part quelques oeuvres qui me semblent déceler quelque intérêt, l'écrasante production du reste me laisse plus que perplexe. Le trait est épais, insensible, stupide, sans recherche, sans nuances, sans éblouissement. On sent une maladresse de collégien et un piètre onirisme d'une platitude inouie.
Pourtant, Redon ne semblait pas un homme parfaitement stupide quand il disait "Après un effort pour copier minutieusement un caillou, un brin d'herbe, une main, un profil ou tout autre chose de la vie vivante ou inorganique, je sens une ébullition mentale venir, j'ai alors besoin de créer, de me laisser aller à la représentation de l'imaginaire. La nature, ainsi dosée et infusée devient ma source , ma levure, mon ferment. De cette origine, je crois mes inventions vraies, je le crois de mes dessins".
Si son propos est intéressant, en outre qu'il ouvre des perspectives non dénuées d'intérêt à son époque, Redon peine pourtant à passionner et à nous surprendre avec ses croquis mornes, macabres et terreux.
Néanmoins, je fus séduit par le "Caliban sur une branche"(1881). Cette drôlerie cauchemardesque frappe par la fulgurante apparition d'une créature à la fois monstrueuse et spirituelle.
"Le sommeil, figure de profil, la main sur la face"(1889) touche la curiosité également. cette tête féminine délavée, éthérée, comme enveloppée du voile brumeux d'un songe rappelant un peu une initiation mystique ou une visitation laisse entrevoir des arrières-mondes mysterieux. la façon dont Redon met en scène et fait éprouver une impression personnelle et subtile est admirable.
Malgré donc quelques illuminations ça et la, on en peut se départir d'un sentiment amer. Tout cela manque d'aboutissement et relève plus de l'illustration peu inspirée que de l'Art. Novateur à son époque, Redon aurait-il mal vieilli? ces fantaisies brouilllonnes très 19eme siècle provoquent lassitude et soupirs. Mais peut-être me trompe-je lourdement, la chambre de débats est ouverte et tout avis pertient est le bienvenu.